Le long weekend de l’Action de grâce est à nos portes, peut-être même déjà amorcé pour certains. Pour plusieurs, il ne s’agit que d’un congé férié, une occasion de prolonger le weekend ou de faire un saut chez la famille lointaine. Pour d’autres, c’est le week-end des faucons -ou faut qu’on (faut qu’on fasse ci, faut qu’on fasse ça) : ranger le mobilier de jardin, abrier les arbustes plus fragiles, planifier le changement de pneus sur la voiture et y mettre le balai à neige… Toutes ces petites tâches qui nous rappellent que l’été est bel et bien révolu et que les premières neiges pourraient se pointer n’importe quand.
Mais c’est quoi l’Action de grâce ? Sur Internet, on m’informe qu’il s’agit d’une fête pour célébrer les récoltes et rendre grâce des bonheurs reçus pendant l’année. Je savais le lien avec les récoltes. Je suis heureuse de découvrir le reste du sens… rendre grâce des bonheurs reçus durant l’année, car c’est exactement de ça que je voulais parler.
L’Action de grâce évoque chez moi ce souvenir des retrouvailles en famille à la maison-mère. N’appartenant à aucune religion, une fois réunis autour de la table, il n’y avait pas vraiment de prière, mais nous prononcions quand même nos « grâces ». À tour de rôle, chaque convive, dès qu’il était en âge de s’exprimer, était invité à remercier la vie pour ce qu’elle lui apportait. Ma mère n’est plus là, mais la tradition se poursuit. Je n’attends toutefois pas l’Action de grâce pour rendre grâce. Chaque jour je remercie pour toute l’abondance qui m’est offerte.
Mais à qui dire merci? Si je dis merci à la Vie, c’est comme si ce je disais que ce que j’ai est le fruit du hasard, que je n’ai rien à voir avec cette abondance. Je suis plutôt du genre « aide-toi et le ciel t’aidera » et « on récolte ce que l’on sème »! Je me considère 100% responsable de ma vie, même si je sais que je ne contrôle pas tout! Personne n’est à l’abri d’une tempête, d’une invasion de grillons ou de gel au sol alors que les fruits n’ont pas tous été cueillis! Mais si la vie me donne un citron, je peux m’apitoyer. Je préfère en faire une tarte, avec ben de la meringue! Bon, oui, des fois je rechigne un peu à l’amertume qui me monte en bouche, mais rapidement je cherche ce que je peux faire avec ce qui m’est offert.
Puisque je crois fermement que je suis responsable de ma vie, de ce que je sème, et de mon attitude quand je ne récolte pas tout à fait ce que je veux, j’ai choisi de me rendre grâce à moi! De me remercier sincèrement, et profondément d’avoir semé et entretenu mon jardin de vie et pouvoir dire que je récolte de magnifiques fruits pulpeux et juteux à tous points de vue : une relation amoureuse saine, des enfants autonomes et surtout intelligents de cœur, un confort matériel adéquat, un corps qui, bien que rondelet, me permet de faire à peu près tout ce dont j’ai envie, un travail que je peux presque modeler selon ma volonté, des collègues engagés qui ne demandent qu’à collaborer. Bien sûr, je ne suis pas la seule artisane de cette luxuriance. D’autres humains et la Terre elle-même y contribuent. Peut-être même à leur détriment à certains moments, sans que je m’en rende compte. Ma gratitude est d’autant plus sentie.
Rendre grâce! Ça peut avoir l’air banal, mais ce n’est pas si facile de le faire en conscience. Quand l’abondance est dans notre vie depuis longtemps, il est facile de la tenir pour acquise. Pourtant, rappelons-nous que tout est impermanent, tout finit par passer. L’abondance d’aujourd’hui peut vite se transformer en disette. C’est la loi des Cycles, et c’est là que c’est plus difficile. Rendre grâce, c’est aussi savoir exprimer sa gratitude pour les cadeaux qui arrivent mal emballés !
***
Aujourd’hui, je prends consciente de toute l’abondance que je récolte, et je me rends grâce pour les efforts consentis à semer et entretenir le jardin de ma vie. Je rends grâce aussi à tous les vivants et autres éléments qui ont contribué à ce que je puisse bénéficier de cette moisson.
